
Si le plus exécrable des excès
auquel la luxure puisse porter l'homme qu'elle tient dans son honteux
esclavage, est de chercher à contenter sa passion avec des bêtes et des
objets inanimés, le plus haut degré de la chasteté est de n'être pas
plus touché ni ému par les créatures animées que par celles qui ne le
sont pas.
Si le dernier terme de l'avarice consiste à ne jamais cesser
de travailler pour augmenter les richesses que l'on possède déjà et à ne
jamais savoir se contenter, assurément la preuve la plus frappante
qu'on aime et qu'on pratique la pauvreté, doit être de ne pas même
épargner son propre corps.
Se croire dans un état doux et tranquille au
milieu des afflictions les plus cruelles, sera la preuve de la plus
héroïque patience.
Le comble de la fureur et de la colère est bien
certainement de se livrer aux emportements, lorsqu'on est seul; le
comble de la douceur et de la modération doit donc être de demeurer dans
le calme, soit en l'absence, soit en la présence des calomniateurs.
Si
le dernier degré du délire auquel puisse faire arriver la vaine gloire
consiste à penser et à croire qu'on mérite d'être loué, et qu'on reçoit
des louanges que personne ne donne ni ne peut donner; la marque la plus
sûre qu'on a foulé aux pieds tout sentiment de vanité, c'est de ne pas
en éprouver le plus léger mouvement au milieu même des éloges qu'on nous
donne pour les bonnes œuvres que nous avons eu le bonheur de pratiquer.
Si le vrai caractère de l'orgueil, cette maudite peste des âmes, est de
nous faire élever au-dessus des autres, quelque vils et méprisables que
nous soyons, ne faut-il pas convenir que le caractère essentiel de
l'humilité, cette mère féconde des vertus, consiste à conserver des
sentiments d'abjection et de mépris pour soi-même au milieu des plus
grandes entreprises et des actions les plus honorables et les plus
éclatantes ?
Si c'est un témoignage irréfragable qu'on est esclave de
toutes les passions, quand, sans aucune résistance, on succombe à toutes
les tentations du démon, c'est, à mon avis, une marque certaine qu'il
est parvenu à la bienheureuse paix de l'âme l'homme qui peut dire
ouvertement avec David : «Je ne connaissais pas le méchant qui
s'éloignait de moi» (cf. Ps 100, 4), et ajouter : «Je ne sais ni comment ni
pourquoi il est venu, ni comment il s'est retiré ; car étant uni à mon
Dieu par des liens si forts qu'ils ne me permettront pas de me séparer
de Lui, je suis insensible à toutes ces choses et à d'autres semblables.»
« Du ciel terrestre, c'est-à-dire de la paix de l'âme, qui la
rend semblable à Dieu en la perfectionnant et en lui procurant la
résurrection avant la résurrection générale » (О земном небе, или о богоподражательном бесстрастии и совершенстве, и воскресении души прежде общего воскресения/ XXIX
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