mercredi 13 avril 2022

degré VII, LV (L)

Lestvitsa Pour nous inciter davantage à cette affliction véritable et à cette salutaire tristesse, écoutons cette histoire utile à l'âme et très propre à exciter la pitié : 

Un moine, nommé Stéphane, demeurait ici. Il embrassa la vie érémitique et hésychaste. Ayant passé de nombreuses années dans le gymnase de la vie monastique, il était tout paré de ses jeûnes et surtout de ses larmes, et entouré des fleurs d'autres vertus éminentes. Il avait sa cellule sur cette sainte montagne, sur le versant d'Élie, le saint voyant de Dieu. Mais, par la suite, cet homme vénérable, voulant se livrer efficacement à une pénitence plus austère, se retira dans la région des anachorètes, appelée Sidè. Là, il mena plusieurs années une vie très fervente et d'une grande austérité. Ce lieu était dépourvu de toute consolation humaine et presque inaccessible aux hommes, car il était environ à soixante-dix milles de la forteresse. Vers la fin de sa vie, le vieillard revint dans sa cellule sur la sainte montagne; il avait deux disciples palestiniens, d'une grande piété, qui en avaient pris soin durant son absence. Au bout de quelques jours, il fut saisi de la maladie qui devait l'emporter. La veille de sa mort, il fut ravi en esprit; les yeux grands ouverts, il regardait à droite et à gauche de son lit, comme si quelqu'un lui demandait des comptes. Chacun des assistants l'entendait dire tantôt : « Oui, en vérité, c'est exact ! mais c'est pour cette raison que j'ai jeûné pendant tant d'années! »   Tantôt : « Non, vous mentez, je n'ai pas fait cela ! » Et de nouveau : 
« Oui, c'est tout à fait vrai! mais j'ai pleuré et j'ai rempli mon
 service ! » et de nouveau : « Non, vous calomniez! » Puis il disait encore : « Oui, c'est exact ! Oui ! Et je ne sais que dire à cela ! Mais 
Dieu est miséricordieux ! » Et c'était là en vérité un spectacle
 terrible et affreux que cette reddition de comptes invisible et sans 
pitié. Et le plus terrible, c'est qu'on l'accusait de ce qu'il n'avait pas  fait. Quelle chose étrange ! Devant plusieurs de ses fautes, cet hésychaste, cet anachorète ne trouvait à dire que ces mots : « Je n'ai rien à répondre à cela », bien qu'il ait été moine pendant près de quarante ans, et gratifié du don des larmes. Hélas ! Hélas ! Où était donc la parole d'Ézéchiel : « Je te jugerai dans l'état où je te trouverai, dit Dieu
. (Éz. 33, 13. 16)» Il ne pouvait rien dire de semblable pour se justifier. Pourquoi ? Gloire à celui qui seul le sait ! Et des gens dignes de foi m'ont raconté qu'il avait même nourri de sa main un léopard au désert. Et tandis qu'il était ainsi sommé de rendre des comptes, il quitta son corps, nous laissant complètement dans l'incertitude au sujet de son jugement, de sa fin, de la sentence, et de la manière dont se termina la reddition de ses comptes.

« De la tristesse qui produit la Joie » (О радостотворном плаче)

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